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Petit recueil de textes ou d'extraits qui me font vibrer...

"Ici, nous nous proposons de partir de l'idée simple qui est celle-ci :  l'univers n'est pas obligé d’être beau. Nous pourrions imaginer un univers uniquement fonctionnel, sans qu'aucune idée de beauté ne vienne l'effleurer. Ce serait un univers qui se contenterait de fonctionner, où un ensemble d'éléments neutres, indifférenciés, se meuvent, se remuent, indéfiniment. On aurait affaire là à un monde de robots, ou à un monde concentrationnaire ; l'on ne serait plus dans l'ordre de la Vie. Pour qu'il y ait vie, il faut qu'il y ait différenciation des éléments, laquelle, se complexifiant, a pour conséquence la formation de chaque être en sa singularité. Cela est conforme à la loi de la vie qui implique que chaque être constitue une unité organique, spécifique et possède en même temps la capacité de croître et de se transmettre. C'est ainsi que la gigantesque aventure de la vie a abouti à chaque herbe, à chaque insecte, à chacun de nous, chacun, unique et non interchangeable."

Œil ouvert et cœur battant, François Cheng

"Le plus haut point de la raison est-il de constater ce glissement du sol sous nos pas, de nommer pompeusement interrogation un état de stupeur continuée, recherche un cheminement en cercle, Être ce qui n'est jamais tout à fait?

Mais cette déception est celle du faux imaginaire, qui réclame une positivité  qui comble exactement son vide. C'est le regret de n'être pas tout. Regret qui n'est pas même tout à fait fondé. Car si, ni en peinture, ni même ailleurs, nous ne pouvons établir de hiérarchie des civilisations ni parler de progrès, ce n'est pas que quelque destin nous retienne en arrière, c'est plutôt qu'en un sens la première des peintures allait jusqu'au fond de l'avenir. Si nulle peinture n'achève la peinture, si même nulle œuvre ne s'achève absolument, chaque création change, altère; éclaire, approfondit, confirme, exalte, recrée ou crée d'avance toutes les autres. Si les créations ne sont pas un acquis, ce n'est pas seulement que, comme toutes choses, elles passent, c'est aussi qu'elles ont presque toute leur vie devant elles. "

L'Oeil et l'Esprit, Maurice Merleau-Ponty

"La chair est-elle donc un maillage ou une atmosphère ? Doit-elle être comparée au feutre de la tente ou à la tactilité et à la sonorité du monde de vent et de climat ? Mon idée est qu'elle réside dans l'alternance des deux. C'est l'atmosphère pour l'inspiration, et le maillage pour l'expiration. Le maillage et l'atmosphère sont, enfin de compte, les deux faces de la chair (les deux aspects de l'espace lisse) correspondant aux deux sens "d'être avec" que j'ai distingué plus haut. L'être vivant, l'être qui respire, est le site où l'immersion atmosphérique se transforme en un maillage de lignes qui prolifèrent -comme, dans la forge, le mouvement de la pompe des soufflets convertit le minerai solide en métal fluide ; ou l'air gonflant les poumons du laboureur qui se transforme en sillons dans la terre ; ou le vent qui devient le sillage du voilier ; ou la lumière du soleil qui se convertit en tiges et racines de plantes. C'est dans cette transformation que réside la relation entre les lignes et l'atmosphère, une relation qui est, je crois, fondamentale à toute vie animée."

Tim Ingold, Une brève histoires des lignes

empreinte

""Je" suis un jardin-forêt permacole, là où les morales classiquent voulaient que je sois un impeccable jardin à la française, là où le romantisme me fantasmait en jardin à l'anglaise, et là où la morale néolibérale exige que je sois une parcelle de monoculture à haut rendement.

[...]  L'erreur de la morale classique, en un mot, est qu'elle a pris l'animal comme modèle des passions, et qu'elle s'est trompée fondamentalement sur l'animal".

Manière d'être vivant, Baptiste Morizot.

«  [...} la créativité, en tant qu’innovation, est censée produire de l’inattendu, de l’inédit, de l’inouï, elle n’a d’objet que celui qu’elle fait surgir, elle se conjugue au futur et à l’impératif, ou, mieux, au performatif. Elle ne saurait être programmée, puisqu’elle est censée justement contredire ou déborder tout ce qui aurait été présupposé, préconçu ou prévisualisé par une intention quelconque, elle ne peut qu’antidater rétroactivement son propre ressort. Telle est la gageuse : ce qu’on entendait créer, il suffisait de ne pas l’avoir visé pour le réaliser. »

– L’art comme malentendu- Michel Thévoz

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